Contexte : la myélofibrose est une malignité hématologique rare qui peut être guérie par une greffe de cellules souches hématopoïétiques (HSCT) et de nombreuses études montrent que la survie de 3 à 5 ans après HSCT est comprise entre 45 et 70% en condition standard relative (maladie en phase chronique, donneur HLA apparié). Les rechutes et la mortalité liée à la greffe sont plus fréquentes au cours des deux premières années suivant la HSCT. Afin d’optimiser la prise en charge à long terme de ces patients, nous nous sommes posé la question du devenir à long terme des patients survivant en rémission au moins 2 ans après HSCT. De plus, c’est une question récurrente du patient de savoir si son espérance de vie peut rejoindre celle de la population générale une de nombreuses années après la greffe.

Méthode : à partir du registre EBMT, les patients transplantés de 1995 à 2014 avec un diagnostic de myélofibrose primaire ou secondaire même si la maladie s’est transformée en leucémie myéloïde aiguë (LMA) à un moment donné avant la greffe ont été inclus. Seuls les pays ayant réalisé au moins 20 greffes pour cette indication au cours de la période ont été inclus. Parmi les 2461 patients de 15 pays répondant à ces critères, 1245 et 650 étaient en vie à 2 et 5 ans, respectivement. La survie globale a été comparée à une population appariée par âge, sexe, année et pays. La surmortalité a été définie comme la différence entre la mortalité observée chez les patients atteints de myélofibrose et la mortalité dans une population appariée et représente la mortalité spécifiquement due à la myélofibrose et à son traitement. Des modèles de cox multivariables pour la surmortalité ont été calculés pour tous les patients, les patients vivants aux repères de 2 et 5 ans après la transplantation.

Résultats : l’âge médian au moment de la transplantation était de 55 ans (de 19 à 76 ans) ; 1906 (77%) patients avaient une myélofibrose primaire, 421 (17%) une myélofibrose secondaire et 134 (6%) étaient transformés en leucémie aiguë myéloïde (LAM) au moment de la transplantation. Un régime de conditionnement d’intensité réduite a été utilisé chez 1503 (63%) patients et la majorité des patients (87%) ont reçu une greffe de cellules souches du sang périphérique. 1024 (43%) patients ont été transplantés à partir d’un donneur de la fratrie apparié HLA. La majorité des événements (décès, rechute) sont survenus au cours des deux premières années de la transplantation. L’incidence cumulative à deux ans de la mortalité par rechute et sans rechute était de 23 % (IC95 % : 21-25 %) et 26 % (IC95 % : 25-28 %). Le modèle multivariable de Cox pour la surmortalité de l’ensemble de la cohorte (sans repère) révèle que la myélofibrose transformée en LAM (HR : 1,7, p<0,0001), l’irradiation dans le régime (HR 1,3, p=0,002), l’utilisation d’un donneur frère ou sœur non compatible HLA (HR 1,3, p<0,0001) et l’âge (p<0,0001) étaient tous significativement associés à une plus mauvaise survie. En revanche, le sexe féminin était associé à un meilleur résultat (HR 0,9, p=0,055).

Nous avons également analysé le résultat à long terme après les repères de 2 et 5 ans. La survie à 8 ans pour les patients vivants 2 ans après la transplantation était de 69% représentant un excès de mortalité par rapport à la population appariée (Figure 1). La survie à 5 ans pour les patients vivants 5 ans après la transplantation était de 84% (Figure 2). Avec le repère de 5 ans, l’incidence cumulée de rechute était de 13% et la mortalité sans rechute était de 8% 5 ans plus tard. En ce qui concerne les causes primaires de décès à 5 ans, il y avait 24 rechutes/progressions de la maladie primaire, 13 autres tumeurs malignes, 12 GVHD, 13 infections, 1 toxicité et 17 causes inconnues. Chez les patients en vie au bout de 2 ans, le sexe féminin était fortement associé à un meilleur résultat (HR 0,7, p=0,018), ainsi que l’âge avancé (HR 1,03, p<0,0001). Aucun des autres facteurs de risque n’a eu d’effet significatif dans cette population de référence. Chez les patients vivants à 5 ans, le sexe (HR : 0,4, p=0,026) et l’âge (HR : 1,04 ; p=0,028) ont été confirmés comme étant associés indépendamment à un meilleur résultat (HR 0,44). Les figures 3 et 4 montrent la survie globale en fonction de l’âge et du sexe du receveur, par rapport aux populations appariées respectives.

Conclusion : l’analyse à long terme chez les patients transplantés pour une myélofibrose montre qu’il existe toujours une surmortalité par rapport à la population appariée mais cette surmortalité est plus faible chez les patients plus jeunes et chez les femmes. Les variables liées aux procédures de transplantation (type de donneur, TBI) ne sont plus des facteurs de risque pour le résultat à long terme.

Disclosions

Schetelig : Sanofi Aventis : Consultance, financement de la recherche ; Roche : Honoraria ; Abbvie : Honoraria ; Janssen : Conseil, Honoraires. Robinson : Riemser : Conseil ; Roche : Honoraires, Autres : Subventions de voyage ; Takeda : Conseil, Honoraires, Autres : Subventions de voyage ; Gilead : Honoraires, Autres : Subventions de voyage.

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